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LAPOINTE_ALEXIS (ALEXIS LE TROTTEUR) PARTIE 1
FORUM DE GÉNÉALOGIE & D'HISTOIRES :: BIBLIOTHEQUE :: Blogues et Histoires :: Aussi vrai que je te parle par Doyen
LAPOINTE_ALEXIS (ALEXIS LE TROTTEUR) PARTIE 1
Notes pigées sur le net, il y a plusieurs années. (Par Doyen)
Notes individuelles
LAPOINTE, ALEXIS, dit Alexis le Trotteur, fabricant de fours à pain, ouvrier, coureur à pied et figure populaire, né le 4 juin 1860 à La Malbaie, Bas-Canada, fils de François Lapointe, cultivateur, et d'Adelphine Tremblay, dit Picoté ; décédé célibataire le 12 janvier 1924 à Saint-Joseph-d'Alma (Alma, Québec) et inhumé le 16 dans sa ville natale. Alexis Lapointe, dit Alexis le Trotteur, fut le huitième enfant d'une famille qui en compterait 14. Son grand-père maternel, Alexis Tremblay*, dit Picoté, figura parmi les membres importants de la Société des entrepreneurs des pinières du Saguenay (connue plus tard sous le nom de Société des vingt et un), qui ouvrit la région du Saguenay à la colonisation au printemps de 1838. Élevé chrétiennement dans un milieu modeste, Alexis reçut une éducation sûrement comparable à celle des autres fils de cultivateurs de son époque. Son instruction resta en revanche sommaire. Naïf et d intelligence médiocre, il fréquenta probablement l'école du rang pendant tout au plus un an. Il reconnaissait assez bien les pièces de monnaie, mais se laissait facilement tromper. Aucun document écrit de sa main n a été retrouvé ; il ne sut donc vraisemblablement ni lire ni écrire, contrairement à ses parents. Il garderait toute sa vie durant un esprit enfantin, ce qui ne l empêcherait pas de se montrer, à l occasion, spirituel et malin. Ses yeux, d'un vert incertain, présentaient une caractéristique spéciale : l'iris en était encerclé par une ligne pâle, de sorte que son il comportait plusieurs couleurs différentes. Seul et un peu à son propre insu, Alexis développa très tôt les prédispositions organiques et anatomiques pour la course à pied dont la nature l avait doté. Il améliora sa capacité de parcourir de grandes distances à un point tel qu il atteindrait des performances jusque-là insoupçonnées. Adulte, il serait de taille moyenne (soit environ cinq pieds sept pouces) et plutôt trapu. Sa forte cage thoracique, ses épaules larges, ses bras anormalement longs, ses cuisses musclées, ses genoux osseux et pointus lui donneraient une allure pour le moins athlétique. Lapointe était un homme à tout faire et c est ainsi qu il gagna sa vie dans les régions de Charlevoix, du Saguenay et du Lac-Saint-Jean, principalement dans les moulins à scier, les chantiers de bûcherons et les fermes. À la mort de sa mère, survenue le 13 avril 1890, il se rendit dans la vallée de la Matapédia, où le commerce du bois était florissant. Pendant les dix années qu il passa au sud du fleuve Saint-Laurent, il pénétra dans les terres pour se rendre jusque dans le Maine et le Vermont, où il travailla dans les chantiers. Vers 1900, il rentra à La Malbaie. Il se découvrit un nouveau métier dans lequel il excella, celui de fabricant de fours à pain. Il l exerçait surtout d une façon bien spéciale : rares étaient en effet ceux qui mélangeaient la glaise et l'eau avec leurs pieds, en dansant et en piétinant dans l'auge, et qui y ajoutaient quelque potion magique pour donner à l'âtre toute son âme Ce métier le força à se déplacer d un village à un autre. Coureur devant l'Éternel, il ne demeura jamais plus d'une saison au même endroit. Dans toutes les régions qu il a parcourues, Lapointe fit également profession d amuseur public. Musicien, il jouait de l'harmonica, de la bombarde ou simplement du peigne (recouvert d'une écorce de bouleau ou d'un papier mince). Pendant les soirées de danse, ses gigues éperdues, qui duraient de longues heures, en ont étonné plusieurs. Au fil des ans, il s identifia de plus en plus au cheval : il hennissait, ruait, piétinait, se fouettait, s'attelait, courait, mâchouillait même de l'avoine. C est ainsi qu il acquit de la popularité : petit à petit, on commença à le remarquer, à le pointer du doigt, à rire et à s'amuser de ses prouesses. À l âge de 26 ans, il se mesurait aux meilleurs trotteurs, sautait des clôtures de cèdre, faisait la course avec des trains, défiait même les navires. Même si les exploits de Lapointe, rapportés principalement par des témoins oculaires, prendraient, au cours des années, un caractère légendaire, ils garderaient un fond de vérité appréciable ; l'étude de son ossature révélerait en effet l'étoffe d'un champion. Grâce à ses courses, ses sauts, ses danses interminables, sa manière de vivre, de travailler et de se déplacer, Alexis le Trotteur atteignit une forme physique maximale. À l instar de bien d autres, il aurait probablement pu faire bonne figure à l'épreuve du marathon à Athènes en 1896, à l occasion des premiers Jeux olympiques de l'ère moderne. Amoureux sans complexe de tout ce qui portait jupe et cheveux longs, Lapointe demeura célibataire. Il demanda toutefois une douzaine de femmes en mariage ; il s y prenait toujours de la même façon, soit en exhibant une lettre qui attestait qu il possédait des biens et des propriétés au nord du lac Saint-Jean. Sa manière de manifester sa flamme aux belles qu'il convoitait a continuellement été celle d'un adolescent un peu original que l on n a jamais pris au sérieux. Lapointe perdit la vie accidentellement. Un wagon plat le happa au moment où il déambulait sur une des voies ferrées qui reliait les rives de la rivière La Grande Décharge ; il exécutait alors différents travaux journaliers pour la Quebec Development Company Limited, compagnie responsable de la construction d'un important barrage hydroélectrique entre Alma et l'île Maligne, dans la région du Lac-Saint-Jean [V. sir William Price]. Courir, amuser les gens, raconter des histoires, animer des soirées, construire des fours, faire des blagues et jouer des tours, voilà ce qui a constitué l'univers d'Alexis Lapointe, celui à qui Marius Barbeau*, entre autres, consacrerait plusieurs ouvrages. Imaginatif, il passa souvent pour un original : sans objectif à atteindre, il se contenta de vivre du moment présent. Il semblait cultiver la certitude qu il y aurait toujours des portes ouvertes pour l'accueillir, des chantiers de bûcherons dont il pourrait devenir le marmiton, des fermes et des moulins à scier pour l embaucher comme main-d' uvre passagère. En exécutant ces activités répétitives sous de multiples cieux, Alexis le Trotteur a transformé une existence qui aurait pu être banale en une vie étonnante qui a su alimenter l imaginaire populaire. Jean-Claude Larouche ANQ-Q, CE304-S3, 4 juin 1860. ANQ-SLSJ, P18. Marius Barbeau, « Alexis le Trotteur », le Canada français (Québec), 2e sér., 27 (1939 1940) : 881 891 ; The Kingdom of Saguenay (Toronto, 1936) ; le Saguenay légendaire (Montréal, 1967). Marjolaine Bouchard, le Cheval du Nord (Chicoutimi, Québec, 1999). J.-C. Larouche, Alexis le Trotteur (Montréal, 1971 ; 2e éd., Chicoutimi, 1987) ; Alexis le Trotteur : athlète ou centaure ? (Saint-Nazaire-de-Chicoutimi, Québec, 1977) © 2004 Université Laval/University of Toronto
Alexis le trotteur---------------------- D'après des ouvrages de Jean-Claude Larouche.------------------------- Alexis Lapointe fut une figure marquante de la région de Charlevoix et du lac Saint-Jean, au tournant du siècle. Au cours de sa vie on lui a donné toutes sortes de sobriquets : Alexis le Nigaud, le Cheval du Nord, le Surcheval, mais c'est sous le nom d'Alexis le Trotteur qu'il est le plus connu. Ses prouesses à la course ont fait le tour du pays. Alexis pouvait voyager aussi vite à pied que ses contemporains à cheval, en voiture ou même en chemin de fer. Il gagnait même des courses contre les trains. Alexis le Trotteur était-il un précurseur naturel des grands athlètes olympiques ? Peut-être... mais il n'était pas qu'une légende au royaume du Saguenay. Plusieurs se souviennent encore de ses exploits. Il mourut en 1924, frappé par une locomotive qu'il tentait de devancer. Son squelette est exposé au musée du Saguenay à Chicoutimi de même que des objets lui ayant appartenu. -------------------- Alexis Lapointe, né dans une ferme à La Malbaie en 1860, était un petit garçon turbulent. Sa famille comptait quatorze enfants.============== À cette époque, les travaux de la ferme nécessitaient beaucoup de bras et l'on n'envoyait pas les enfants à l'école bien longtemps. Alexis faisait mille travaux et dès son jeune âge, il développa un goût pour les chevaux et les courses. Il se fabriquait des petits chevaux avec des bouts de bois et s'inventait des courses contre le vent.---------------------- Il aimait à se mesurer à d'autres gamins. Avant de courir, il se fouettait les jambes avec une branche en criant : -------------------- - Hue ! Hue !------------------ Et il partait comme une flèche, sautant par-dessus les obstacles. Il arrivait toujours avant les autres.-------------------- Il grandit et devint un fameux joueur de tours. Il jouait de l'harmonica avec adresse et il aimait par-dessus tout les veillées de campagne et les fêtes. Il quitta la maison familiale très jeune et fit quarante-six métiers pour gagner sa vie, dont celui de constructeur de fours à pain. --------------------- Toutes les maisons du Québec de ce temps avaient un four à pain bien rond et chaulé construit à l'extérieur. Alexis excellait dans ce travail. Il parcourait les rangs et allait d'une ferme à l'autre pour construire ses fours. Des branches recourbées servaient d'armature et une épaisse couche de glaise séchée lui donnait sa forme. Il fallait voir Alexis piétiner la glaise dans l'auge avant d'enduire son four. Il se fouettait les jambes et ses muscles entraient en action. Une vraie machine à pilonner ! L'automne, il partait dans les chantiers et revenait au printemps. Et là, il parcourait les veillées pour danser. Il semblait infatigable, étant capable de danser des gigues simples pendant cinq heures d'affilée sans se fatiguer.----------------- Alexis parsemait sa vie de prouesses sans en tirer trop de gloire. Il se faisait même prier parfois pour participer à une course. Et il n'acceptait pas toujours les défis qu'on lui lançait. Mais quand il courait, il gagnait. On venait de loin pour le voir.--------------- Il rendait aussi bien des services pour un peu d'argent. Par exemple, il allait chercher le courrier dans un dépôt en courant sur une distance de trente kilomètres. Il faisait ce trajet en moins d'une heure----------------L'anecdote la plus connue veut qu'un jour, il se trouvait au quai de La Malbaie avec son père qui attendait le départ du bateau pour Bagotville et Chicoutimi : le bateau quittait le quai à onze heures pour arriver à Bagotville à vingt-trois heures. Alexis voulait embarquer avec son père mais celui-ci refusa de l'emmener. Alors Alexis lui dit :--------------- - Quand vous arriverez à Bagotville,je prendrai les amarres. Et il fila.---------------- Pour faire le trajet par le chemin de terre il fallait compter cent quarante-six kilomètres. Alexis retourna à la maison, saisit un petit fouet, se fouetta les jambes et partit. Lorsque le bateau arriva à Bagotville, Alexis était sur le quai qui l'attendait. Il avait couru la distance en moins de douze heures. On se demande encore d'où lui venait cette formidable facilité de courir. Il faut dire qu'il s'entraînait sans cesse, en sautant, dansant et pirouettant. En fait, Alexis Lapointe, le simple, se prenait vraiment pour un cheval. À qui voulait lui lancer un défi à la course, il répondait : « Tu peux pas courir plus vite que Poppé !»---------------------- Poppé, le cheval du nord, c 'était lui
Re: LAPOINTE_ALEXIS (ALEXIS LE TROTTEUR) PARTIE 1
PARTIE 2doyen a écrit:
Notes pigées sur le net, il y a plusieurs années. (Par Doyen)
Notes individuelles
LAPOINTE, ALEXIS, dit Alexis le Trotteur, fabricant de fours à pain, ouvrier, coureur à pied et figure populaire, né le 4 juin 1860 à La Malbaie, Bas-Canada, fils de François Lapointe, cultivateur, et d'Adelphine Tremblay, dit Picoté ; décédé célibataire le 12 janvier 1924 à Saint-Joseph-d'Alma (Alma, Québec) et inhumé le 16 dans sa ville natale. Alexis Lapointe, dit Alexis le Trotteur, fut le huitième enfant d'une famille qui en compterait 14. Son grand-père maternel, Alexis Tremblay*, dit Picoté, figura parmi les membres importants de la Société des entrepreneurs des pinières du Saguenay (connue plus tard sous le nom de Société des vingt et un), qui ouvrit la région du Saguenay à la colonisation au printemps de 1838. Élevé chrétiennement dans un milieu modeste, Alexis reçut une éducation sûrement comparable à celle des autres fils de cultivateurs de son époque. Son instruction resta en revanche sommaire. Naïf et d intelligence médiocre, il fréquenta probablement l'école du rang pendant tout au plus un an. Il reconnaissait assez bien les pièces de monnaie, mais se laissait facilement tromper. Aucun document écrit de sa main n a été retrouvé ; il ne sut donc vraisemblablement ni lire ni écrire, contrairement à ses parents. Il garderait toute sa vie durant un esprit enfantin, ce qui ne l empêcherait pas de se montrer, à l occasion, spirituel et malin. Ses yeux, d'un vert incertain, présentaient une caractéristique spéciale : l'iris en était encerclé par une ligne pâle, de sorte que son il comportait plusieurs couleurs différentes. Seul et un peu à son propre insu, Alexis développa très tôt les prédispositions organiques et anatomiques pour la course à pied dont la nature l avait doté. Il améliora sa capacité de parcourir de grandes distances à un point tel qu il atteindrait des performances jusque-là insoupçonnées. Adulte, il serait de taille moyenne (soit environ cinq pieds sept pouces) et plutôt trapu. Sa forte cage thoracique, ses épaules larges, ses bras anormalement longs, ses cuisses musclées, ses genoux osseux et pointus lui donneraient une allure pour le moins athlétique. Lapointe était un homme à tout faire et c est ainsi qu il gagna sa vie dans les régions de Charlevoix, du Saguenay et du Lac-Saint-Jean, principalement dans les moulins à scier, les chantiers de bûcherons et les fermes. À la mort de sa mère, survenue le 13 avril 1890, il se rendit dans la vallée de la Matapédia, où le commerce du bois était florissant. Pendant les dix années qu il passa au sud du fleuve Saint-Laurent, il pénétra dans les terres pour se rendre jusque dans le Maine et le Vermont, où il travailla dans les chantiers. Vers 1900, il rentra à La Malbaie. Il se découvrit un nouveau métier dans lequel il excella, celui de fabricant de fours à pain. Il l exerçait surtout d une façon bien spéciale : rares étaient en effet ceux qui mélangeaient la glaise et l'eau avec leurs pieds, en dansant et en piétinant dans l'auge, et qui y ajoutaient quelque potion magique pour donner à l'âtre toute son âme Ce métier le força à se déplacer d un village à un autre. Coureur devant l'Éternel, il ne demeura jamais plus d'une saison au même endroit. Dans toutes les régions qu il a parcourues, Lapointe fit également profession d amuseur public. Musicien, il jouait de l'harmonica, de la bombarde ou simplement du peigne (recouvert d'une écorce de bouleau ou d'un papier mince). Pendant les soirées de danse, ses gigues éperdues, qui duraient de longues heures, en ont étonné plusieurs. Au fil des ans, il s identifia de plus en plus au cheval : il hennissait, ruait, piétinait, se fouettait, s'attelait, courait, mâchouillait même de l'avoine. C est ainsi qu il acquit de la popularité : petit à petit, on commença à le remarquer, à le pointer du doigt, à rire et à s'amuser de ses prouesses. À l âge de 26 ans, il se mesurait aux meilleurs trotteurs, sautait des clôtures de cèdre, faisait la course avec des trains, défiait même les navires. Même si les exploits de Lapointe, rapportés principalement par des témoins oculaires, prendraient, au cours des années, un caractère légendaire, ils garderaient un fond de vérité appréciable ; l'étude de son ossature révélerait en effet l'étoffe d'un champion. Grâce à ses courses, ses sauts, ses danses interminables, sa manière de vivre, de travailler et de se déplacer, Alexis le Trotteur atteignit une forme physique maximale. À l instar de bien d autres, il aurait probablement pu faire bonne figure à l'épreuve du marathon à Athènes en 1896, à l occasion des premiers Jeux olympiques de l'ère moderne. Amoureux sans complexe de tout ce qui portait jupe et cheveux longs, Lapointe demeura célibataire. Il demanda toutefois une douzaine de femmes en mariage ; il s y prenait toujours de la même façon, soit en exhibant une lettre qui attestait qu il possédait des biens et des propriétés au nord du lac Saint-Jean. Sa manière de manifester sa flamme aux belles qu'il convoitait a continuellement été celle d'un adolescent un peu original que l on n a jamais pris au sérieux. Lapointe perdit la vie accidentellement. Un wagon plat le happa au moment où il déambulait sur une des voies ferrées qui reliait les rives de la rivière La Grande Décharge ; il exécutait alors différents travaux journaliers pour la Quebec Development Company Limited, compagnie responsable de la construction d'un important barrage hydroélectrique entre Alma et l'île Maligne, dans la région du Lac-Saint-Jean [V. sir William Price]. Courir, amuser les gens, raconter des histoires, animer des soirées, construire des fours, faire des blagues et jouer des tours, voilà ce qui a constitué l'univers d'Alexis Lapointe, celui à qui Marius Barbeau*, entre autres, consacrerait plusieurs ouvrages. Imaginatif, il passa souvent pour un original : sans objectif à atteindre, il se contenta de vivre du moment présent. Il semblait cultiver la certitude qu il y aurait toujours des portes ouvertes pour l'accueillir, des chantiers de bûcherons dont il pourrait devenir le marmiton, des fermes et des moulins à scier pour l embaucher comme main-d' uvre passagère. En exécutant ces activités répétitives sous de multiples cieux, Alexis le Trotteur a transformé une existence qui aurait pu être banale en une vie étonnante qui a su alimenter l imaginaire populaire. Jean-Claude Larouche ANQ-Q, CE304-S3, 4 juin 1860. ANQ-SLSJ, P18. Marius Barbeau, « Alexis le Trotteur », le Canada français (Québec), 2e sér., 27 (1939 1940) : 881 891 ; The Kingdom of Saguenay (Toronto, 1936) ; le Saguenay légendaire (Montréal, 1967). Marjolaine Bouchard, le Cheval du Nord (Chicoutimi, Québec, 1999). J.-C. Larouche, Alexis le Trotteur (Montréal, 1971 ; 2e éd., Chicoutimi, 1987) ; Alexis le Trotteur : athlète ou centaure ? (Saint-Nazaire-de-Chicoutimi, Québec, 1977) © 2004 Université Laval/University of Toronto
Alexis le trotteur---------------------- D'après des ouvrages de Jean-Claude Larouche.------------------------- Alexis Lapointe fut une figure marquante de la région de Charlevoix et du lac Saint-Jean, au tournant du siècle. Au cours de sa vie on lui a donné toutes sortes de sobriquets : Alexis le Nigaud, le Cheval du Nord, le Surcheval, mais c'est sous le nom d'Alexis le Trotteur qu'il est le plus connu. Ses prouesses à la course ont fait le tour du pays. Alexis pouvait voyager aussi vite à pied que ses contemporains à cheval, en voiture ou même en chemin de fer. Il gagnait même des courses contre les trains. Alexis le Trotteur était-il un précurseur naturel des grands athlètes olympiques ? Peut-être... mais il n'était pas qu'une légende au royaume du Saguenay. Plusieurs se souviennent encore de ses exploits. Il mourut en 1924, frappé par une locomotive qu'il tentait de devancer. Son squelette est exposé au musée du Saguenay à Chicoutimi de même que des objets lui ayant appartenu. -------------------- Alexis Lapointe, né dans une ferme à La Malbaie en 1860, était un petit garçon turbulent. Sa famille comptait quatorze enfants.============== À cette époque, les travaux de la ferme nécessitaient beaucoup de bras et l'on n'envoyait pas les enfants à l'école bien longtemps. Alexis faisait mille travaux et dès son jeune âge, il développa un goût pour les chevaux et les courses. Il se fabriquait des petits chevaux avec des bouts de bois et s'inventait des courses contre le vent.---------------------- Il aimait à se mesurer à d'autres gamins. Avant de courir, il se fouettait les jambes avec une branche en criant : -------------------- - Hue ! Hue !------------------ Et il partait comme une flèche, sautant par-dessus les obstacles. Il arrivait toujours avant les autres.-------------------- Il grandit et devint un fameux joueur de tours. Il jouait de l'harmonica avec adresse et il aimait par-dessus tout les veillées de campagne et les fêtes. Il quitta la maison familiale très jeune et fit quarante-six métiers pour gagner sa vie, dont celui de constructeur de fours à pain. --------------------- Toutes les maisons du Québec de ce temps avaient un four à pain bien rond et chaulé construit à l'extérieur. Alexis excellait dans ce travail. Il parcourait les rangs et allait d'une ferme à l'autre pour construire ses fours. Des branches recourbées servaient d'armature et une épaisse couche de glaise séchée lui donnait sa forme. Il fallait voir Alexis piétiner la glaise dans l'auge avant d'enduire son four. Il se fouettait les jambes et ses muscles entraient en action. Une vraie machine à pilonner ! L'automne, il partait dans les chantiers et revenait au printemps. Et là, il parcourait les veillées pour danser. Il semblait infatigable, étant capable de danser des gigues simples pendant cinq heures d'affilée sans se fatiguer.----------------- Alexis parsemait sa vie de prouesses sans en tirer trop de gloire. Il se faisait même prier parfois pour participer à une course. Et il n'acceptait pas toujours les défis qu'on lui lançait. Mais quand il courait, il gagnait. On venait de loin pour le voir.--------------- Il rendait aussi bien des services pour un peu d'argent. Par exemple, il allait chercher le courrier dans un dépôt en courant sur une distance de trente kilomètres. Il faisait ce trajet en moins d'une heure----------------L'anecdote la plus connue veut qu'un jour, il se trouvait au quai de La Malbaie avec son père qui attendait le départ du bateau pour Bagotville et Chicoutimi : le bateau quittait le quai à onze heures pour arriver à Bagotville à vingt-trois heures. Alexis voulait embarquer avec son père mais celui-ci refusa de l'emmener. Alors Alexis lui dit :--------------- - Quand vous arriverez à Bagotville,je prendrai les amarres. Et il fila.---------------- Pour faire le trajet par le chemin de terre il fallait compter cent quarante-six kilomètres. Alexis retourna à la maison, saisit un petit fouet, se fouetta les jambes et partit. Lorsque le bateau arriva à Bagotville, Alexis était sur le quai qui l'attendait. Il avait couru la distance en moins de douze heures. On se demande encore d'où lui venait cette formidable facilité de courir. Il faut dire qu'il s'entraînait sans cesse, en sautant, dansant et pirouettant. En fait, Alexis Lapointe, le simple, se prenait vraiment pour un cheval. À qui voulait lui lancer un défi à la course, il répondait : « Tu peux pas courir plus vite que Poppé !»---------------------- Poppé, le cheval du nord, c 'était lui
Re: LAPOINTE_ALEXIS (ALEXIS LE TROTTEUR) PARTIE 1
doyen a écrit:PARTIE 2doyen a écrit:
Notes pigées sur le net, il y a plusieurs années. (Par Doyen)
Notes individuelles
LAPOINTE, ALEXIS, dit Alexis le Trotteur, fabricant de fours à pain, ouvrier, coureur à pied et figure populaire, né le 4 juin 1860 à La Malbaie, Bas-Canada, fils de François Lapointe, cultivateur, et d'Adelphine Tremblay, dit Picoté ; décédé célibataire le 12 janvier 1924 à Saint-Joseph-d'Alma (Alma, Québec) et inhumé le 16 dans sa ville natale. Alexis Lapointe, dit Alexis le Trotteur, fut le huitième enfant d'une famille qui en compterait 14. Son grand-père maternel, Alexis Tremblay*, dit Picoté, figura parmi les membres importants de la Société des entrepreneurs des pinières du Saguenay (connue plus tard sous le nom de Société des vingt et un), qui ouvrit la région du Saguenay à la colonisation au printemps de 1838. Élevé chrétiennement dans un milieu modeste, Alexis reçut une éducation sûrement comparable à celle des autres fils de cultivateurs de son époque. Son instruction resta en revanche sommaire. Naïf et d intelligence médiocre, il fréquenta probablement l'école du rang pendant tout au plus un an. Il reconnaissait assez bien les pièces de monnaie, mais se laissait facilement tromper. Aucun document écrit de sa main n a été retrouvé ; il ne sut donc vraisemblablement ni lire ni écrire, contrairement à ses parents. Il garderait toute sa vie durant un esprit enfantin, ce qui ne l empêcherait pas de se montrer, à l occasion, spirituel et malin. Ses yeux, d'un vert incertain, présentaient une caractéristique spéciale : l'iris en était encerclé par une ligne pâle, de sorte que son il comportait plusieurs couleurs différentes. Seul et un peu à son propre insu, Alexis développa très tôt les prédispositions organiques et anatomiques pour la course à pied dont la nature l avait doté. Il améliora sa capacité de parcourir de grandes distances à un point tel qu il atteindrait des performances jusque-là insoupçonnées. Adulte, il serait de taille moyenne (soit environ cinq pieds sept pouces) et plutôt trapu. Sa forte cage thoracique, ses épaules larges, ses bras anormalement longs, ses cuisses musclées, ses genoux osseux et pointus lui donneraient une allure pour le moins athlétique. Lapointe était un homme à tout faire et c est ainsi qu il gagna sa vie dans les régions de Charlevoix, du Saguenay et du Lac-Saint-Jean, principalement dans les moulins à scier, les chantiers de bûcherons et les fermes. À la mort de sa mère, survenue le 13 avril 1890, il se rendit dans la vallée de la Matapédia, où le commerce du bois était florissant. Pendant les dix années qu il passa au sud du fleuve Saint-Laurent, il pénétra dans les terres pour se rendre jusque dans le Maine et le Vermont, où il travailla dans les chantiers. Vers 1900, il rentra à La Malbaie. Il se découvrit un nouveau métier dans lequel il excella, celui de fabricant de fours à pain. Il l exerçait surtout d une façon bien spéciale : rares étaient en effet ceux qui mélangeaient la glaise et l'eau avec leurs pieds, en dansant et en piétinant dans l'auge, et qui y ajoutaient quelque potion magique pour donner à l'âtre toute son âme Ce métier le força à se déplacer d un village à un autre. Coureur devant l'Éternel, il ne demeura jamais plus d'une saison au même endroit. Dans toutes les régions qu il a parcourues, Lapointe fit également profession d amuseur public. Musicien, il jouait de l'harmonica, de la bombarde ou simplement du peigne (recouvert d'une écorce de bouleau ou d'un papier mince). Pendant les soirées de danse, ses gigues éperdues, qui duraient de longues heures, en ont étonné plusieurs. Au fil des ans, il s identifia de plus en plus au cheval : il hennissait, ruait, piétinait, se fouettait, s'attelait, courait, mâchouillait même de l'avoine. C est ainsi qu il acquit de la popularité : petit à petit, on commença à le remarquer, à le pointer du doigt, à rire et à s'amuser de ses prouesses. À l âge de 26 ans, il se mesurait aux meilleurs trotteurs, sautait des clôtures de cèdre, faisait la course avec des trains, défiait même les navires. Même si les exploits de Lapointe, rapportés principalement par des témoins oculaires, prendraient, au cours des années, un caractère légendaire, ils garderaient un fond de vérité appréciable ; l'étude de son ossature révélerait en effet l'étoffe d'un champion. Grâce à ses courses, ses sauts, ses danses interminables, sa manière de vivre, de travailler et de se déplacer, Alexis le Trotteur atteignit une forme physique maximale. À l instar de bien d autres, il aurait probablement pu faire bonne figure à l'épreuve du marathon à Athènes en 1896, à l occasion des premiers Jeux olympiques de l'ère moderne. Amoureux sans complexe de tout ce qui portait jupe et cheveux longs, Lapointe demeura célibataire. Il demanda toutefois une douzaine de femmes en mariage ; il s y prenait toujours de la même façon, soit en exhibant une lettre qui attestait qu il possédait des biens et des propriétés au nord du lac Saint-Jean. Sa manière de manifester sa flamme aux belles qu'il convoitait a continuellement été celle d'un adolescent un peu original que l on n a jamais pris au sérieux. Lapointe perdit la vie accidentellement. Un wagon plat le happa au moment où il déambulait sur une des voies ferrées qui reliait les rives de la rivière La Grande Décharge ; il exécutait alors différents travaux journaliers pour la Quebec Development Company Limited, compagnie responsable de la construction d'un important barrage hydroélectrique entre Alma et l'île Maligne, dans la région du Lac-Saint-Jean [V. sir William Price]. Courir, amuser les gens, raconter des histoires, animer des soirées, construire des fours, faire des blagues et jouer des tours, voilà ce qui a constitué l'univers d'Alexis Lapointe, celui à qui Marius Barbeau*, entre autres, consacrerait plusieurs ouvrages. Imaginatif, il passa souvent pour un original : sans objectif à atteindre, il se contenta de vivre du moment présent. Il semblait cultiver la certitude qu il y aurait toujours des portes ouvertes pour l'accueillir, des chantiers de bûcherons dont il pourrait devenir le marmiton, des fermes et des moulins à scier pour l embaucher comme main-d' uvre passagère. En exécutant ces activités répétitives sous de multiples cieux, Alexis le Trotteur a transformé une existence qui aurait pu être banale en une vie étonnante qui a su alimenter l imaginaire populaire. Jean-Claude Larouche ANQ-Q, CE304-S3, 4 juin 1860. ANQ-SLSJ, P18. Marius Barbeau, « Alexis le Trotteur », le Canada français (Québec), 2e sér., 27 (1939 1940) : 881 891 ; The Kingdom of Saguenay (Toronto, 1936) ; le Saguenay légendaire (Montréal, 1967). Marjolaine Bouchard, le Cheval du Nord (Chicoutimi, Québec, 1999). J.-C. Larouche, Alexis le Trotteur (Montréal, 1971 ; 2e éd., Chicoutimi, 1987) ; Alexis le Trotteur : athlète ou centaure ? (Saint-Nazaire-de-Chicoutimi, Québec, 1977) © 2004 Université Laval/University of Toronto
Alexis le trotteur---------------------- D'après des ouvrages de Jean-Claude Larouche.------------------------- Alexis Lapointe fut une figure marquante de la région de Charlevoix et du lac Saint-Jean, au tournant du siècle. Au cours de sa vie on lui a donné toutes sortes de sobriquets : Alexis le Nigaud, le Cheval du Nord, le Surcheval, mais c'est sous le nom d'Alexis le Trotteur qu'il est le plus connu. Ses prouesses à la course ont fait le tour du pays. Alexis pouvait voyager aussi vite à pied que ses contemporains à cheval, en voiture ou même en chemin de fer. Il gagnait même des courses contre les trains. Alexis le Trotteur était-il un précurseur naturel des grands athlètes olympiques ? Peut-être... mais il n'était pas qu'une légende au royaume du Saguenay. Plusieurs se souviennent encore de ses exploits. Il mourut en 1924, frappé par une locomotive qu'il tentait de devancer. Son squelette est exposé au musée du Saguenay à Chicoutimi de même que des objets lui ayant appartenu. -------------------- Alexis Lapointe, né dans une ferme à La Malbaie en 1860, était un petit garçon turbulent. Sa famille comptait quatorze enfants.============== À cette époque, les travaux de la ferme nécessitaient beaucoup de bras et l'on n'envoyait pas les enfants à l'école bien longtemps. Alexis faisait mille travaux et dès son jeune âge, il développa un goût pour les chevaux et les courses. Il se fabriquait des petits chevaux avec des bouts de bois et s'inventait des courses contre le vent.---------------------- Il aimait à se mesurer à d'autres gamins. Avant de courir, il se fouettait les jambes avec une branche en criant : -------------------- - Hue ! Hue !------------------ Et il partait comme une flèche, sautant par-dessus les obstacles. Il arrivait toujours avant les autres.-------------------- Il grandit et devint un fameux joueur de tours. Il jouait de l'harmonica avec adresse et il aimait par-dessus tout les veillées de campagne et les fêtes. Il quitta la maison familiale très jeune et fit quarante-six métiers pour gagner sa vie, dont celui de constructeur de fours à pain. --------------------- Toutes les maisons du Québec de ce temps avaient un four à pain bien rond et chaulé construit à l'extérieur. Alexis excellait dans ce travail. Il parcourait les rangs et allait d'une ferme à l'autre pour construire ses fours. Des branches recourbées servaient d'armature et une épaisse couche de glaise séchée lui donnait sa forme. Il fallait voir Alexis piétiner la glaise dans l'auge avant d'enduire son four. Il se fouettait les jambes et ses muscles entraient en action. Une vraie machine à pilonner ! L'automne, il partait dans les chantiers et revenait au printemps. Et là, il parcourait les veillées pour danser. Il semblait infatigable, étant capable de danser des gigues simples pendant cinq heures d'affilée sans se fatiguer.----------------- Alexis parsemait sa vie de prouesses sans en tirer trop de gloire. Il se faisait même prier parfois pour participer à une course. Et il n'acceptait pas toujours les défis qu'on lui lançait. Mais quand il courait, il gagnait. On venait de loin pour le voir.--------------- Il rendait aussi bien des services pour un peu d'argent. Par exemple, il allait chercher le courrier dans un dépôt en courant sur une distance de trente kilomètres. Il faisait ce trajet en moins d'une heure----------------L'anecdote la plus connue veut qu'un jour, il se trouvait au quai de La Malbaie avec son père qui attendait le départ du bateau pour Bagotville et Chicoutimi : le bateau quittait le quai à onze heures pour arriver à Bagotville à vingt-trois heures. Alexis voulait embarquer avec son père mais celui-ci refusa de l'emmener. Alors Alexis lui dit :--------------- - Quand vous arriverez à Bagotville,je prendrai les amarres. Et il fila.---------------- Pour faire le trajet par le chemin de terre il fallait compter cent quarante-six kilomètres. Alexis retourna à la maison, saisit un petit fouet, se fouetta les jambes et partit. Lorsque le bateau arriva à Bagotville, Alexis était sur le quai qui l'attendait. Il avait couru la distance en moins de douze heures. On se demande encore d'où lui venait cette formidable facilité de courir. Il faut dire qu'il s'entraînait sans cesse, en sautant, dansant et pirouettant. En fait, Alexis Lapointe, le simple, se prenait vraiment pour un cheval. À qui voulait lui lancer un défi à la course, il répondait : « Tu peux pas courir plus vite que Poppé !»---------------------- Poppé, le cheval du nord, c 'était lui
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