Haldimand nommé gouverneur le 27 juin 1778 est dur envers les Canadiens-français.

Le général Frederick Haldimand, Suisse d'origine, mais au service de l'Angleterre depuis de longues années, remplaça Guy Carleton comme gouverneur du Canada, le 27 juin 1778.  C'était un militaire de mérite, mais fort soupçonneux et d'une sévérité outrée.  Comme les Américains, aidés des Canadiens-français, continuaient à lutter victorieusement pour obtenir leur indépendance, Haldimand crut de son devoir de combattre sans merci toute tendance et même une simple manifestation de sympathie en faveur des révolutionnaires.

Le secret des correspondances était violé.  Des centaines de personnes, hommes et femmes, étaient arrêtées et jetées en prison sous le moindre prétexte; un simple soupçon suffisait.  On transportait à Québec et à Montréal ceux qu'on redoutait le plus.  À Montréal, il fallut convertir en prison le couvent des Récollets. Il y avait des prisonniers à l'Assomption, à Nicolet, à  Yamaska, à Chambly et dans plusieurs autres localités, où on les nourrissaient au pain et à l'eau.

Celui qui dénonçait un coupable ou dénichait un document compromettant recevait une gratification de $8.00.  Des citoyens imprudents furent jetés en prison avec fracas, afin de terroriser la population, tandis que d'autres furent séquestrés soudainement et à l'insu des parents et amis.  Un nommé André fut emprisonné et nourri au pain et à l'eau pendant 18 mois sans que sa femme sût ce qu'il était devenu.

Les accusés étaient atteints non seulement dans leur liberté mais jusque dans leurs biens.  Plusieurs furent ruinés de cette façon.  Les prisonniers réclamaient en vain leur procès ou leur liberté; ils étaient élargis selon le bon plaisir du gouverneur.

Cet état de choses dura jusqu'au traité de Paris, signé le 3 septembre 1783, par lequel l'Angleterre reconnaissait officiellement l'indépendance des Etats-Unis.  Haldimand libéra alors les prisonniers.

Pierre du Calvet, commerçant et juge de paix, fut accusé d'avoir poussé quelques Canadiens-français à agir comme espions pour les Américains et d'avoir vendu des marchandises à ces derniers.  Jeté en prison, il fut libéré en 1783.  Il prépara un habile mémoire qu'il envoya en Angleterre, et dans lequel il mêlaient les assertions les plus fausses à quelques réels sujets de plainte.  Haldimand fut rappelé à Londres et fut remplacé par Carleton devenu Lord Dorchester.
Élie de Salvail, fec.

(Lire la chronique :  "Les Canadiens-français qui ont aidé à la révolution américaine"  plus bas dans le Forum pour plus d'informations sur les "espions")